Article rédigé pour La Revue [DEMOS] France
La société est au croisement de deux évolutions majeures : l’augmentation du temps libre – environ 5h par jour – et l’accessibilité à l’information grâce au développement du numérique. Réunis, le temps et la connaissance mènent à l’enrichissement intellectuel, propice à l’essor d’esprits éclairés.
Hors, 70% du temps libre est consacré à la télévision alors que la lecture incarne moins d’1%. Un constat a fortiori saisissant lorsque l’audience télévisuelle est représentée à 86% par des programmes grand public (divertissements, fictions) contre 14% pour les contenus plus exigeants (émissions culturelles, films d’auteurs,..).
“Se divertir, c’est détourner la pensée de ce dont on souffre pour mieux le supporter” citait le philosophe B. Pascal. Ces mots encore d’actualité au sein d’une société qui aspire à faire diversion de son quotidien, favorisant de facto la croissance du divertissement tel un échappatoire du réel et de l’ennui. Selon Havas, 83% des personnes considèrent le divertissement vital.
De plus, le désir accru au plaisir immédiat transforme le temps libre en un marché, celui de l’attention. Une aubaine pour l’industrie des réseaux sociaux, du streaming ou encore des jeux vidéo, sucreries cognitives offrant à chacun la possibilité de laisser instantanément vagabonder son esprit comme une dépendance à l’inaction, où la place à la réflexion n’est plus. P. Le Lay, ancien PDG de TF1, déclarait : “Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible”.
Le besoin de se divertir est légitime pour s’évader un instant des contraintes et servitudes de la vie mais cette passivité ne doit être une finalité. Savoir, c’est choisir d’être libre. Rendre les divertissements davantage culturels et la culture divertissante est l’opportunité de penser, d’agir et de se construire. “La culture, c’est ce qui répond à l’homme quand il se demande ce qu’il fait sur terre”, A. Malraux.
Auteur: Aurélien Laffond
